Même si les travailleuses du CES ont formellement accès aux droits syndicaux prévus par la loi (droit à la syndicalisation, à la négociation collective de leurs conditions de travail, etc.), dans les faits, ces droits leur sont inaccessibles, pour des raisons que nous expliquons dans l’encadré ci-dessous. Elles peuvent néanmoins exercer leur droit constitutionnel d’association (protégé par l’article 2d de la Charte canadienne des droits et libertés et par l’article 3 de la Charte des droits et libertés de la personne) en se regroupant avec d’autres travailleuses du CES (et individus et regroupements avec qui elles peuvent créer des alliances) et en menant des actions collectives pour faire entendre leurs revendications auprès des autorités.
Comme d’autres lois du travail, celle qui encadre les droits syndicaux au Québec ̶ le Code du travail ̶ est totalement inadaptée pour les relations de travail atypiques propres au CES. En vertu de cette loi (et de l’interprétation des tribunaux, à ce jour), les travailleuses du CES doivent former un syndicat pour chaque domicile où elles exécutent leurs heures de travail et négocier ensuite leurs conditions de travail auprès de chaque personne usagère desservie. Cet exercice est non seulement insensé, mais impossible. Alors que les tribunaux interprètent le droit du travail en identifiant la personne usagère comme l’employeur aux fins de l’application du Code du travail, le principal pouvoir sur les conditions de travail (incluant sur le salaire) dans le CES est pourtant exercé par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). C’est en effet ce dernier qui détermine les modalités du programme CES ainsi que la rémunération et ce sont les établissements publics (CLSC/CISSS/CIUSSS) sous son égide qui déterminent les plans de services (donc les tâches) exécutés par le personnel du CES.
Pour les quelque 25 000 travailleuses du CES, il serait possible d’accéder à un réel droit à la représentation et à la négociation collectives si le ministre du Travail du Québec acceptait de changer les règles du jeu. Il pourrait, de concert avec les organisations syndicales et communautaires représentant les travailleuses, instituer un régime sectoriel de relations du travail pour l’ensemble du secteur des services privés d’aide à domicile, voire des services de longue durée (incluant les services de répit et d’hébergement).